Martin, Augustin et Vincent, Domaine de la Préceptorie, Domaine Augustin et sélection Parcé Frères.
Les Fils de Marc Parcé sur le cru Maury, Collioure & Banyuls et sur la quasi totalité des appellations de la catalogne française.
Une vision paysanne du vin, pérenne et familiale, une volonté de prendre soin de l’héritage reçu.
Mais pourquoi faire court ? Alors voici quelques éléments pouvant parler de nous, de notre histoire, de nos racines…
Parcé Frères, un lien de famille, un lien au terroir, un style commun. Un travail commun, un travail en lien, un travail dans un lieu, en lien avec un lieu, un lieu magnifique où je suis né, en Catalogne du nord, dans le sud de notre belle France, à Banyuls-sur-Mer.
Un courant moderne largement répandu voudrait que nous ne nous intéressions plus à l’histoire, à nos racines.
Une folie.
L’homme vit, se nourrit, grandit grâce à l’histoire. L’importance de l’histoire, de notre histoire, histoire de famille, histoire de liens, de lieux, histoire à recevoir, à accepter, à transmettre, à écrire, «Tu seras un homme mon fils* ».
La famille nous demande aujourd’hui de prendre la suite, le relais, d’écrire, d’être acteurs. Terroirs de Collioure, de Banyuls et Maury, Domaine Augustin, La Préceptorie.
Une famille, des liens, des lieux.
Liens et lieux à défendre, à révéler, à soutenir.
L’histoire a commencé par hasard, au mois d’octobre 1976 lorsque Marc, notre père, est allé remplacer un ouvrier à la vigne de notre arrière-grand-mère, Thérèse Reig, pour quelques semaines.
Il semble que des liens se soient formés, que des lieux aient parlé, aient séduit. Un amour est né, un amour pour ses usages « locaux loyaux et constants », pour ses appellations contrôlées, protégées.
Un amour consommé, voulu, choisi et cet amour inconditionnel a porté ses fruits, s’est répandu.
Nous, nous avons reçu cette histoire, ses liens, ses lieux, cet amour. L’adage dit que le plus dur n’est pas de progresser mais de se maintenir. Voilà notre engagement, notre désir, notre « Fiat ». Maintenir, oui maintenir librement cette histoire, ce lien, cet amour !
À nous de nous inscrire, nous inscrire dans le temps.
*Rudyard Kipling “If”
Vincent Parcé, pour la Maison Parcé Frères
Les problèmes de transmissions sont plus que jamais d’actualité, transmission des savoirs, transmission des savoir-faire, transmission de l’avoir, transmission de l’être, transmission de l’histoire, transmission des cultures, transmission du langage, transmission du verbe.
Pour ceux de notre génération il fallait absolument tuer le père et en agriculture on a justifié beaucoup de destruction – destruction de paysage, destruction de culture – au nom d’un soi-disant progrès : pour avoir moi-même participé à cette destruction je mesure à quel point on peut détruire le passé avec les meilleures intentions du monde et au nom de la modernité. On ne peut que se réjouir de l’actuelle vulgarisation de l’œuvre d’Anna Harendt, cette philosophe juive qui a montré à quel point la notion de progrès en humanité après la shoah, le goulag et Nagasaki est une chose bien fragile et bien difficile à croire.
Avant elle, Simone Weil, la grande Simone, pendant la seconde guerre mondiale nous interrogeait sur la capacité de l’occident à détruire le passé en l’opposant à l’avenir alors qu’ils sont tout un : « Depuis plusieurs siècles, les hommes de race blanche ont détruit du passé partout, stupidement, aveuglément, chez eux et hors de chez eux. Si à certains égards il y a eu néanmoins progrès véritable au cours de cette période, ce n’est pas à cause de cette rage, mais malgré elle, sous l’impulsion du peu de passé demeuré vivant. »
Etymologiquement transmettre c’est mettre ici ce qui était là, c’est passer d’ici à là, c’est passer outre, au-delà et quand on a dit cela on comprend toute la difficulté de la chose parce qu’inévitablement quelque soit l’œuvre réalisée, restaurée ou entretenue, il est nécessaire à un moment donné de s’en déposséder, de s’en séparer et que nous le voulions ou pas, nous sommes dans une situation où cette séparation devient nécessaire et indispensable pour celui ou ceux qui arrivent ; autant dire qu’il s’agit obligatoirement d’un arrachement, d’une déchirure douloureuse.
Il me semblait difficile, impossible, de méditer sur ce thème sans parler de mes parents et grands parents – et ce d’autant plus que nous avons donné leur nom à certains de nos vins – à ce que mes parents, grands-parents et arrières grands-parents m’ont transmis, à ce terreau dans lequel j’ai grandi, à l’expression vivante, plus exactement, l’expression de leur « survivance », de la permanence de leur présence auprès de moi tous les jours.
La pierre posée à chaque murette, la mauvaise herbe arrachée au pied de chaque souche, ces dizaines, ces centaines de gestes, ces milliers de gestes quotidiens soi-disant sans importance et insignifiants mais qui font à la fin de l’année à la fin d’une vie que le vin fait ici ne sera jamais comme ailleurs.
La gratuité et l’anonymat du geste juste qui permet d’arriver à la perfection en évitant l’orgueil, c’est à dire de nous redonner une juste place dans la création, dans notre participation à la création en acceptant la place du libre serviteur inutile, en acceptant de n’être qu’une partie d’un tout qui nous échappe, en nous intégrant, nous assimilant, nous fondant dans une histoire collective qui respecte ce qui l’a précédée, ce qui l’a construit, façonnée. Et le fruit de cette disposition, de cette posture qui nous met ou plutôt qui nous remet à notre juste place, celle que nous n’aurions jamais du quitter avant de nous prendre pour des dieux, maîtres inconséquents d’une nature qui nous rappelle de temps en temps sa force et sa faiblesse, et bien quand l’homme a compris, a repris sa juste place, il retrouve la joie.
Une appellation c’est, sur un terroir ayant une identité, géographique, géologique et climatique, la réalisation d’une communauté humaine qui s’inscrit dans une histoire et une culture données.
C’est à travers les contraintes acceptées de ce cadre que peut s’exprimer le vigneron, la vraie liberté n’étant plus de « faire ce que l’on veut » mais un au-delà des règles imposées. La notion d’appellation relève donc d’une philosophie particulière et il nous semble malheureusement que l’actuelle conception de l’homme, empêtré dans son individualisme, son libéralisme et son égocentrisme, est un peu étrangère à cette approche très « classique » de la vie. Contrairement à l’art moderne où la personnalité de l’exécutant est primordiale, les peintres « classiques » imaginaient facilement ne pas signer leurs œuvres.
Quant aux compagnons qui construisirent les cathédrales, la réalisation d’une œuvre collective anonyme était pour eux d’une évidence lumineuse.
Pour revenir et terminer sur la transmission, elle oblige à une attitude « d’effacement », pour, quand l’heure et l’âge arrive, se séparer de son œuvre. François Cheng l’explicite bien :
« Il n’y a pas plus narcissique qu’un occidental, occupé à se contempler devant le miroir, à se réaliser- une obsession !
L’oriental, lui, a compris que le soi est en fin de compte bien pauvre et limité, que l’important, c’est ce qui est en avant de lui : un sourire, une main tendue, un échange verbal…
Les orientaux ont compris que l’humilité est une position avantageuse. D’abord, parce qu’on ne risque pas de tomber plus bas. Mais surtout parce que, toute chose rejoignant la racine, les feuilles qui tombent à terre fécondant le renouveau de la nature, on est ainsi plus près des trésors de la vie. »
Alors…alors transmettre c’est accepter de n’être que le fruit mais tout le fruit d’une communauté humaine, chacun ayant sa saveur et son équilibre particulier, le résultat et l’acteur – et non le consommateur – d’une œuvre obligatoirement collective où chacun a porté et supporté le meilleur et le pire de lui-même et des autres, sans vouloir se mettre en avant, avec tout ce que cette attitude peut comporter d’éphémère et d’éternel à la fois !
Marc Parcé.
C’est comprendre combien le passé est présent dans l’avenir quand on ne l’enferme pas dans un immobilisme morbide et mortifère :
« Il serait vain de se détourner du passé pour ne penser qu’à l’avenir. C’est une illusion dangereuse de croire qu’il y ait même là une possibilité. L’opposition entre l’avenir et le passé est absurde.. L’avenir ne nous apporte rien, ne nous donne rien ; c’est nous qui pour le construire devons tout lui donner, lui donner notre vie elle-même. Mais pour donner il faut posséder, et nous ne possédons d’autre vie, d’autre sève, que les trésors hérités du passé et digérés, assimilés, recréés par nous. De tous les besoins de l’âme humaine, il n’y en a pas de plus vital que le passé. »
Simone Weil.